~ 006 ~

 

*

 

— Heeey regardez qui voilà, LE plus beau !!! s’exclame joyeusement Éva en sautant affectueusement sur son fils aîné dès que celui-ci est de retour à la maison.

Éva Gutter, de nom de jeune fille, Éva Lee son nom d’artiste, Éva Bauer depuis son mariage avec l’amour de sa vie, Raphaël Bauer.

— Désolé, je me suis pourtant dépêché, répond Joakim avec un petit air gêné, tout en enlaçant sa mère qui le couvre de bises

— Tu exagères, râle aussitôt Raphaël, son père, en le fusillant du regard. Il lui avait tout de même demandé de ne pas traîner pour revenir chez eux ! Son fils n’a décidément aucun respect et cela l’agace.

— Il n’est pas si tard que ça, temporise Éva en pinçant affectueusement la joue droite de son enfant, — Tu ne te rends pas compte, mais c’est prenant une vie d’ado !

— Maman, je peux te montrer l’enregistrement du spectacle ?! s’enquit Erika à son tour en s’immisçant dans la scène, trépignant derrière sa mère, le regard suppliant.

— Bien sûr ! Allez on vous abandonne les garçons, adieu !!! Préviens Éva en direction des concernés, avant de grimper au premier avec sa fille. Il est vrai que sa tournée lui a fait rater une représentation de l’école de danse de sa fille. Être absente à ces spectacles n’était pas son habitude et elle a l’intention de se faire pardonner de ce manquement à ses obligations de super-maman.

— Hey ! Où est ton sac de cours ? S’interloque Raphaël une fois seul au salon avec son fils et alors que lui aussi allait monter au premier, pour rejoindre sa chambre.

– Au lycée.

— Tu te fous de moi ?!

— Quoi ? Me saoule pas, mes affaires sont au lycée, dans mon casier.

— Mais tu n’as pas ramené tes cours pour faire tes devoirs alors ??

— Bien vu, Scherlock. Je monte si tu n’as rien d’intelligent à me dire.

— Ce n’est pas avec ce laxisme que tu auras ton bac !

— Tu m’en diras tant ! Soupire Joakim en disparaissant au premier.

~ 007 ~

*

— Alors, ça s’est bien passé en mon absence ? Raconte-moi tout ce que j’ai loupé !! Fais chaleureusement Éva une fois seule avec sa fille et confortablement installée sur le lit de celle-ci.

Les deux sont assises côte à côte, la femme brune et l’adolescente châtain, prêtes à regarder l’enregistrement du spectacle des Watcha Say, l’école de danse contemporaine de la prunelle de ses yeux.

— Bah y a rien à raconter, avoue Erika avec franchise en haussant légèrement les épaules — tu sais bien que la maison est morte quand t’es pas là.

— Oh vous êtes tout perdus sans votre môman, vous êtes trop mignons ! Mais mauvaise réponse jeune fille, je ne vous crois pas !!! Ton père, et tes frères, raconte-moi tout, sur eux, allez hop hop, inspecteur Erika ! Tu as été seule dans cette maison bourrée de testostérone pendant deux longs mois, alors tu dois forcément avoir des blagues à me raconter là-dessus ! Dis-moi tout, fille indigne ! Que j’ai pas souffert pendant neuf mois et demi pour autant d’ingratitude ! Namého !

Erika rit, car il est vrai que sa mère rit souvent de l’accouchement terrible qu’avait été celui de ses jumeaux ; quand celui de son frère aîné était passé, crème, apparemment.

— C’est vrai que tu as mérité que je balance… Alors Joakim a abimé le phare gauche du 4×4 il y a deux semaines. T’aurais vu papa, il était vert !

— Jojo, Jojo, Jojo… Il n’en loupe pas une ! Il va filer un ulcère à ton père avant la fin de l’année à ce rythme !

Joakim cherche aussi ! Pensez-y quand vous vous demanderez quel est l’enfant préféré ici !

Éva rit avant de reprendre,

— Et sinon, à part te moquer de ton frère, parle-moi de tes amours !! Comment ça va avec David ?

— Ça va… grince Erika en forçant un sourire, ce qui intrigue bien évidemment sa mère qui ne la connait que trop bien. Elle réagit alors en conséquence, avec un petit air sadique.

— Hummm ? Il t’a fait du mal ? Tu veux que j’aille le castrer ? Y a pas de soucis hein, ton père m’aidera ensuite à jeter le corps dans l’océan, on ne laissera aucune trace ! Tu sais qu’on a suivi chaque épisode de Dexter avec attention !

— T’inquiètes, tout va bien de ce côté-là !

— Mouais ! Si tu veux m’en dire plus, mon oreille et mes outils de tortures seront toujours là pour reprendre le sujet. En attendant, continue de me raconter tout ce que j’ai loupé, niark niark !

— Alarich a été un peu malade, mais là ça va mieux !

— Hein ? Comment ça ? Personne ne me l’a dit ça, au téléphone !! S’interloque Éva en redevenant sérieuse.

— Parce que c’était rien, juste un rhume, on ne voulait pas t’inquiéter.

— Et qu’est-ce que tu es en train de faire, là, banane ?

— Là t’es plus en tournée, niark !

— Ah ouais tu me préserves que lorsque je suis en tournée ! Satan ! Allez, viens on va aller voir Alarich pour la peine !

Les deux interlocutrices se mettent en chemin vers la chambre du concerné.

— Et toi la tournée, ça s’est bien passé ?

— Elle était extra ! J’ai d’ailleurs pris plein de photos à New York, je te les montrerais tout à l’heure !

— Bof, New York…

— Si tu savais le nom des stars avec qui j’ai passé quelques soirées, tu ne dirais pas ça, ma fille…

— AHHHHHHHHH ! Dis-moi tout !

~ 008 ~

Les retrouvailles faites, le repas du soir englouti et les bisous de nuit offerts, il est l’heure pour chaque habitant de la maison de retourner dans ses propres quartiers. C’est avec plaisir que le couple Bauer retrouve enfin la chambre conjugale, ainsi que leur intimité.

— Tu m’as tellement manqué, susurre Raphaël à sa femme, d’une voix emplie de désir. Sensuellement, il caresse ses courbes délicates et bien prononcées… Elle lui a tant manqué.

— Toi aussi, tu as pas idée, mais je suis là maintenant, renvoie amoureusement Éva en plongeant son regard dans celui de son homme qui lui plaît toujours autant qu’au premier jour. Elle a sorti la lingerie et a bien l’intention de rattraper ces deux mois perdus, ce soir.

Après un long baiser tendre et langoureux, elle lui demande, l’air sceptique, quelque peu anxieux

— Est-ce que tout s’est bien passé en mon absence ? Tu ne m’as pas raconté grand-chose. — Ça a été, avec Joakim ?

— Oui, ne t’inquiète pas.

— Ne te mine pas pour Joakim, c’est un grand garçon et si tu lâches du lest un peu, sans doute que vous vous entendrez mieux. Fais-lui confiance…

— Mais j’ai l’impression qu’il s’en fout de tout ! Alors que c’est l’année du bac…

— Je pense qu’il sait ce qu’il fait…

Raphaël embrasse sa femme pour la faire taire. Autant stopper le débat. Sa femme a une confiance aveugle en leur fils, le voyant comme la septième merveille du monde qui réussit tout, quand lui se méfie et s’inquiète tout le temps.

 

*

 

Dix minutes plus tard, dans la maison voisine à droite de celle des Bauer, un frère jumeau appelle sa sœur revenue ce soir de tournée musicale.

Son air est radieux, il esquisse un large sourire tandis qu’il propose à sa sœur adorée de passer la voir pour sortir avec lui, ce soir. Histoire de fêter son retour ! Leurs retrouvailles ! Tous les deux et rien que tous les deux ! Sa jumelle ayant énormément manqué à Jeffrey Beckers durant ces deux mois. Les deux sont si proches depuis l’enfance qu’il fallait qu’à l’âge adulte, leurs maisons sont côte à côte.

— Ce soir, non, je suis crevée. Demain, sans faute ? Décline Éva dans le combiné de son téléphone portable, avant de lui informer timidement qu’elle avait prévu de passer la soirée chez elle, avec son époux. Ce qui est compréhensible. Jeffrey ne peut pas lui en vouloir, après une telle absence.

Il acquiesce alors et lui sourit qu’il sera chez elle le lendemain matin dès neuf heures tapantes, avant de la taquiner soudainement en lui annonçant qu’il se pose une question existentielle !

Prévisible : Éva lui ordonne sur-le-champ et en riant de cracher immédiatement le morceau ! Ce qu’il fait alors sans attendre…

— Ben en fait, si chez nous les bébés mangent avec une petite cuillère, les bébés chinois eux devaient alors manger avec un cure-dent !

Pouffant de rire, Éva lui fait,

— J’en peux plus de toi, à demain frangin adoré !

 

• Parodie •

CT - 08