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Au même moment, dans une petite chambre d’hôtel en bord de plage, Paula se rhabillait avec hâte et angoisse car elle venait d’apprendre le terrible drame qui avait touché sa meilleure amie, la veille.

 

 

Do you remember when we were just kids // Est-ce que tu te souviens de quand on était mômes
And cardboard boxes took us miles from what we would miss // Et ces boîtes de carton remplies de ce dont on ne pouvait se passer
Schoolyard conversations taken to heart // Ces discussions dans la cour de récré
And laughter took the place of everything we knew we were not // On rigolait de tout et de ce qu’on savait qu’on ne deviendrait jamais

 

 

Profitant de son époux en déplacement professionnel, cette femme mariée s’était laissée aller entre ces murs pendant une nuit et presque deux jours, mais les meilleures choses ayant toujours une fin, il fallait bien que la réalité se décide à revenir toquer à sa porte. Et diantre qu’elle le faisait de façon brutale, aujourd’hui….

I miss those blue eyes // Ton regard me manque
How you kiss me at night // Comment tu m’embrassais à la nuit tombée
I miss the way we sleep // M’endormir à tes côtés me manque
Like there’s no sunrise // Comme s’il n’y aurait jamais de lever de soleil
Like the taste of your smile // J’aime le goût de tes baisers
I miss the way we breathe // Respirer avec toi me manque

I wanna break every clock // Je veux casser toutes ces horloges
The hands of time could never move again // Figer le temps
We could stay in this moment (stay in this moment) // On pourrait rester ainsi un moment comme ça
For the rest of our lives // Pour le reste de nos vies
Is it over now hey, hey, is it over now // Est-ce que c’est fini, hey, hey, est-ce que c’est vraiment fini maintenant

– Ich liebe dir Wilfrid, ich habe niemals aufgehört, dich zu lieben…

– Ich liebe dich auch…

But I never told you // Mais je ne t’ai jamais dis
What I should have said // Ce que j’aurais dû te dire
No, I never told you // Non, je ne t’ai jamais dis
I just held it in // Je l’ai juste gardé pour moi

Le choc était vraiment rude et Paula n’en revenait pas. La veille, Alarich Bauer était décédé et la sœur du concernée restait encore hospitalisée. 48Heures de cauchemars pour les parents de ces deux enfants et Paula s’en voulait terriblement d’avoir fait exprès de couper son téléphone pendant toute cette durée. Jamais elle n’aurait pu imaginer que de pareils évènements se produiraient la seule fois où elle s’isolait complètement du monde extérieur…

Son amant, Wilfrid Mulher, n’assumait pas mieux qu’elle ce qu’ils avaient fait ici, mais il ne disait pas le moindre mot sur le sujet, trop honteux, gêné, pour cela. Il avait prit son pied dans cette chambre, mais désormais que le rêve prenait fin et qu’il fallait réaliser la gravité de cette merveilleuse connerie, l’ex musicien ne faisait plus autant le fier qu’il y a quelques heures.

I wanna be your last, first kiss // Je veux être à la fois ton premier baiser et ton dernier
That you’ll ever have // Tout ce que t’auras jamais ailleurs
I wanna be your last, first kiss // Je veux être à la fois ton premier baiser et ton dernier

– Du bist, meine Liebe immer auch schön…

– Du bist noch schöner als in meinen Erinnerungen und ich, betest dich mit den kurzen Haaren an…

And now I miss everything about you // Et maintenant, tout de toi me manque
I can’t believe it, I still want you // Je ne peux pas croire que je te veux encore
After all the things we’ve been through // Après tout ce qu’on a traversé
I miss everything about you // Tout de toi me manque
Without you, whoa… // Sans toi, whoa..

Les deux amants avaient peu parlé pendant ces deux jours car ils ne se retrouvaient pas vraiment dans ce but, le 7 Juin au soir… Lorsque Wilfrid invitait son premier amour à manger une pizza entre amis, il ne s’imaginait pas passer la soirée à lui raconter ses 17 ans en Nouvelle-Calédonie, tout comme Paula ne se voyait pas lui narrer ces mêmes années-là qu’elle avait passé auprès d’un autre homme.

Amazing how life turns out the way that it does // C’est marrant la façon dont la vie se déroule
We end up hurting the worst, the only ones we really love // Au final, ceux qu’on aime le plus sont ceux qu’on aime le plus

Le repas avait donc été très rapide, saupoudré d’anecdotes amusantes mais pas vraiment intimes et la chambre d’hôtel avait très vite été rejointe.

I see your blue eyes // Je vois ton regard
Every time I close mine // A chaque fois que je ferme les yeux
You make it hard to see..// Tu me troubles la vue…

– J’y vais ! On s’appelle !

Paula n’avait rien eu de mieux à balbutier en s’extirpant de la pièce au pas de course et Wilfrid ne trouvait rien à lui répondre alors qu’il se rhabillait à son tour, un peu perplexe sur son propre comportement, son atroce infidélité. Il s’en ira boire un café en ville pour méditer sur tout cela tout en essayant d’analyser ses propres raisons pour avoir fait la connerie de sa vie, sans les comprendre réellement.

Il n’avait encore jamais triché au cours de son mariage et son épouse, pour qui il éprouvait de sincères sentiments, était ce qu’il avait de plus précieux au monde, avec ses enfants, bien entendu. C’est en se souvenant de cela que Wilfrid se disait qu’il ne se voyait pas passer sous silence son infidélité. Tout comme il ne se voyait pas l’avouer en face à l’amour de sa vie. Aussi tolérante et compréhensive qu’elle puisse être, sa petite femme lui hurlerait dessus jusqu’à s’en déchirer le larynx.

Et puis comment se déroulerait une telle conversation…? Au téléphone, au vu de la distance ? Ou dans quelques semaines, sur place, lorsqu’il rentrerait chez lui. Ce qui impliquerait donc le fait de garder cette histoire dans l’ombre aussi longtemps et Wilfrid ne se sentait pas de jouer le jeu si longtemps, il n’en dormirait plus la nuit. Sa femme et lui ayant en effet une relation complice où le mensonge n’avait nullement sa place et tenter de lui cacher quelque chose était perdu d’avance. Sa belle métisse avait un grand sens de la déduction et elle le connaissait mieux que quiconque…

Il lui fallait donc mettre tout cela au clair le plus vite possible et certainement pas à travers un combiné.

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=== 16h30… === 

L’ex musicien se dépêche donc de revenir dans sa chambre d’hôtel ; la vraie cette fois, et non celle prise exceptionnellement pour s’envoyer en l’air avec son ex ; pour envoyer un mail à sa tendre.

Coucou, mon cœur,

Je ne sais pas comment

Tu dois te demander pourquoi

Étant trop occupé pour appeler ce soir, je préfère t’envoyer un mail

Tu me manques mon bébé !

Ça va à la maison ? Tout va bien ?

Mon téléphone est en rade, voilà les raisons de ce mail

Oui Wilfrid avait un mal fou à démarrer ce mail. Sa touche « effacer » chauffait au fil des minutes et sa patience s’usait en même temps qu’elle. Agacé, il finissait par y aller d’une traite,

J’ai fait une énorme bêtise et je ne sais pas comment te l’avouer en face, je pense que je préfère me servir d’un mail pour pouvoir tout te dire d’un coup, sans qu’on ne s’interrompe mutuellement pour s’engueuler, car c’est forcément ce que tu voudras faire lorsque tu sauras. Je pourrais bien entendu tout garder pour moi et me dire que tu l’apprendrais jamais, tout irait bien, je ne recommencerais plus et on vivrait peinard, qu’est-ce qu’un petit mensonge à la con après tout, on serait pas le premier couple qui se ment, ahah, mais ouais non je ne peux pas faire ça. Si l’on doit en finir, autant que cela soit fait paf paf!!!Soyons honnête l’un envers l’autre. Ce n’est bien sur pas ce que je veux.. Tu le sais, à quel point je t’aime non ? Oui, tu le sais… Tu es toute ma vie et les enfants aussi. Pourtant, j’ai couché avec Paula. Je ne vais pas te mentir en te disant un tas de trucs clichés comme quoi, je ne sais pas comment c’est arrivé, c’est elle qui m’a chauffé puis violé, je n’y suis pour rien et blablabla, car je sais très bien ce qu’il s’est passé. Je l’ai revue, j’ai eu envie. Et je sais même pas pourquoi. Après, ce que je ne comprends pas, c’est que c’est toi la femme de ma vie, c’est toi que j’aime, c’est toi que je ne veux pas perdre, je ne veux strictement rien de plus avec Pao’, mais pourtant, j’ai fait cette connerie, je l’ai invité à manger une pizza, et nous sommes ensuite allés à l’hôtel. Je ne sais pas ce qu’il m’a pris. Enfin si, je le sais, j’ai eu envie, je l’ai fait, mais je ne sais pas pourquoi. Mais je te le dis quand même, maladroitement et d’une traite, je ne me relis pas, je me demande si je suis compréhensible, et j’ai déjà peur de ce que tu commences à penser de moi. Je dirais que tu as envie de rompre, et tu aurais raison, de vouloir divorcer, cela serait ton droit. Puis-je dire ce que je veux, moi ? Non, je n’en ai pas le droit, après avoir eu un tel comportement, je n’ai le droit que de fermer ma gueule, mais tant pis, je vais oser le faire, et te rappeler à quel point je peux t’aimer, mon bébé… Quoique tu décides pour nous, souviens toi de cela. Parce que je suis tellement désolé… Je me sens tellement mal tu sais. De me dire que tu ne me pardonneras pas. Je ne comprends pas, je te le jure, je ne comprends pas, parce que c’est toi que j’aime, c’est toi la plus belle et la plus parfaite à mes yeux, c’est toi la seule et unique que je voudrais toujours, mais pourtant, c’est arrivé. Que va-t-il advenir de nous, désormais… ? Que vas-tu décider.. ? Tu ne voudras plus jamais de moi, hein. À mon retour, tu me feras signer des papiers de divorce et tu ne voudras plus jamais entendre parler de moi. On se disputera les enfants, notre famille explosera, blabla, j’ai tout gâché. J’ai commis l’irréparable, et je ne sais même pas pourquoi… PUTAIN !! Mais je t’aime pourtant tellement, je ne devrais pas t’envoyer un tel mail, je devrais tout garder pour moi, tu ne saurais alors jamais ce que j’ai fait, et tout irait biennnnn ! Mais non, tout n’ira jamais bien, parce que tu mérites de savoir, et que je t’aime beaucoup trop pour te faire l’affront de te cacher tout ça. Ton mari est une merde ! Alors j’envoie ce mail!!! Mais je t’en prie, souviens-toi que c’est toi que j’aime, et que rien n’était prémédité !!! Aïsha, c’est toi que j’aime et c’est toi que j’aimerais toujours…

Wilfrid cliquait sur « envoyer » sans rien ajouter de plus, le visage blanc comme un linge et l’estomac plus noué que jamais. Amorphe, pétrifié par ce qu’il venait lui-même de faire alors qu’il n’en était absolument pas obligé, il s’allongeait sur son lit pour rester à fixer bêtement le plafond.

Quelle folie venait-il de faire à l’instant ? Son mariage ne se relèverait jamais de cette connerie ! La femme de sa vie allait l’abandonner et le haïr dès qu’elle ouvrirait sa boite à mails !

Wilfrid ne s’était jamais autant détesté qu’aujourd’hui. Abruti d’avoir trahi la personne qui comptait le plus à ses yeux, demeuré d’être ensuite allé confesser niaisement ce crime…

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Au même moment, Raphaël craque et quitte son couloir fétiche pour filer rejoindre la chapelle de l’hôpital. Lieu sacré où il va rester assis sur l’un des bancs pendant un long, très long… Moment. Ne sachant pas vraiment ce qu’il pouvait faire entre ces murs où un Athée n’avait d’ordinaire pas sa place, à ses yeux, il ne trouvait cependant pas la force de quitter cet endroit, trop las pour se relever, tellement vide pour en trouver l’envie.

Un jeune prêtre finit s’intriguer de le voir ainsi immobile et aussi figé qu’une statue, c’est donc plein de bonnes intentions qu’il vient s’asseoir à ses côtés pour échanger avec lui quelques paroles réconfortantes. Raphaël n’attend pas une minute pour lui demander, d’une voix faible et à peine audible, l’air triste et désemparé, tout en relevant légèrement la tête dans sa direction,

– Est-ce que c’est parce que je ne crois pas en Dieu que ma fille est en train de mourir ?

Des larmes s’échappent des yeux du père de famille et le jeune prêtre, surprit par sa réplique, se presse de le rassurer du mieux qu’il peut. Non, aucun mauvais sort n’était lancé sur les siens et il est certain que tout irait mieux dans les jours à venir.. Il lui fallait juste garder l’espoir, et ne jamais lâcher prise…

 

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Ayant terminé sa journée à Universal Music pour la journée, Amy Wills s’apprête à quitter les lieux avec dans l’idée de filer voir son ami Joakim à l’hôpital. Sa meilleure amie lui en avait en effet, révélé pas mal sur le concerné… Un génie ? Les yeux de la blondinette en pétillent encore d’admiration et son cœur cogne ardemment dans sa poitrine alors qu’un large sourire étire son visage. Son manager le remarque évidemment très vite et c’est avec suspicion qu’il lui demande, l’air sceptique,

– Toi, tu prévois de faire quelque chose lié au fameux Joakim.

– Je pensais aller le soutenir à l’hôpital, oui !! Confesse sans hésiter Amy à cet homme qu’elle considère comme un confident, au vu de sa gentillesse et compréhension,

– Tu penses plutôt te servir des drames qu’il vit pour te rapprocher de lui et laisse moi te dire que c’est une très mauvaise idée.

– Je veux juste le soutenir, rien de plus. Nous sommes amis, aujourd’hui, marmonne Amy, frustrée de se faire ainsi rappeler à l’ordre par un adulte qu’elle respecte énormément pour sa maturité,

– Non Amy, tu ne veux pas le soutenir, tu veux te servir de tout ça pour te rapprocher de lui, tu veux profiter que sa petite amie soit en colère contre lui pour t’afficher devant lui comme celle « qui est mieux qu’elle », tu ne cherches qu’à rejouer le rôle de l’amante transie qui attend derrière lui, et cette fois encore tu te casseras les dents, ne t’a t-il donc pas assez fait souffrir comme cela ? C’est dingue, ce masochisme, tout ça parce que tu ne peux pas laisser ce jeune homme vivre sa vie sans toi.

– Je n’ai pas à faire cela, car nous sommes amis !! Les amis ne vivent pas loin des uns et des autres et grand bien te fasses si tu veux aller t’imaginer n’importe quoi à mon sujet, même si ce n’est pas ton rôle au fond, tu n’es que mon manager hein ?! De quel droit, tu te permets de juger mes amitiés, voir mon comportement ?! Sérieux, tu te prends pour qui…Il vaut mieux qu’on arrête là notre collaboration, ciao, bon débarras !!! Termine Amy, cinglante et froide, avant de quitter les lieux et alors que son manager ne lui répond rien de plus, trop déçu pour le faire. Elle venait de baisser dans son estime, lui qui la pensait plus courageuse que pimbêche, réalisait qu’au fond, ses belles paroles n’étaient que du vent et sa vie entièrement destinée à un gamin qui ne remarquait qu’à peine son existence. 

L'Améthyste