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=== 17h00 ===

Raphaël venait de se faire mettre à la porte de la chambre de sa fille. Les médecins de la concernée ayant déjà été plus que conciliants et compréhensifs avec lui en le laissant rester sur place plus longtemps qu’il ne le pouvait, mais il ne fallait tout de même pas pousser mémé dans les orties et abuser de leur incroyable gentillesse.

Le père de famille se retrouvait donc dans le couloir principal de l’hôpital pour se mettre désormais à la recherche de son fils aîné qui avait soi-disant été emmené en salle de diagnostiques.

Il fallait vingt bonnes minutes à Raphaël pour retrouver enfin son adolescent, après que six accueils différents l’aient redirigé ici ; cet hôpital était vraiment immense et c’était à se demander comment le personnel se repérait en ces lieux ! Raphaël avait bien failli se perdre au moins trois fois avant de finalement atteindre le couloir menant à la fameuse salle de diagnostiques ; grande et large pièce où Joakim campait fièrement, entouré d’une équipe d’hommes en blouses ; surement l’équipe de diagnosticiens. 

Tellement prit au jeu et dans son élément, Joakim ne réalise même pas la présence de son père, vu qu’il est bien trop occupé à se concentrer sur ce qui se dit autour de lui vu qu’il n’a encore jamais rien entendu d’aussi passionnant ! L’adolescent assidu arrivait même parfois à intervenir pour apporter des pierres à l’édifice médical de ces hommes qui ne sont d’ailleurs pas mécontents de l’avoir à leurs côtés.

Ce gamin était bel et bien un surdoué dans leur domaine et cela les fascinait complètement. Peu à peu, il était en train de devenir leur mascotte et Joakim attendait le moment opportun où tous semblaient l’avoir adopté pour leur demander l’autorisation de mettre son nez dans la bibliothèque devant lui et sur laquelle il lorgnait depuis son arrivée ici. Bon nombre d’encyclopédies de médecines y figuraient et en gros, tout le programme médical qu’un diagnosticien avalait au cours de ses longues années d’études, avant d’être finalement diplômé. L’équipe se servait très souvent de ces ouvrages pour se rafraîchir la mémoire.

La demande était si touchante qu’on autorisait sans hésiter la demande du jeune surdoué mais au bout de quelques minutes à le voir faire défiler toutes les pages de l’un des bouquins, les unes après les autres et à une vitesse assez incroyable, les diagnosticiens perdaient leur enthousiasme et commençaient à s’intriguer, pensant à une mauvaise plaisanterie de la part du soi-disant jeune prodige,

L’un d’eux osait alors demander, l’air sceptique,

– Euh, tu es vraiment en train de lire, là ? Parce que tu vas vite, je trouve !

Joakim n’attendait pas pour esquisser aussitôt un sourire en coin, tout en se tapotant fièrement sa tempe droite à l’aide de son index,

– Je vous assure que désormais, le contenu de toutes les pages que j’ai tourné est là-dedans et il n’en sortira plus !

 

 

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Se réalisant de trop en ces lieux et vu que son rejeton ne le calcule absolument pas, de toute manière, Raphaël décide de rentrer chez lui afin de prendre une douche et pleurer sous le jet d’eau pour son fils décédé ainsi que sa fille très mal en point. Il a besoin d’un break…

Il se couchera ensuite sans manger et alors qu’il ne trouvera pas le sommeil avant trois bonnes heures à fixer le plafond, trop occupé à se demander si oui ou non, son Erika s’en sortirait et si oui ou non, son fils aîné allait l’appeler pour lui demander de venir le chercher à l’hôpital, après que ses nouveaux « amis » aient éventuellement débauché. Raphaël donnerait cher pour entendre sonner son téléphone portable, car dans pareil moment, il aimerait avoir son fils à ses côtés, pour ne pas vivre cette première soirée de deuil tout seul. Le père de famille ne désire pas appeler sa mère ni le moindre ami à la rescousse, il voudrait simplement son ainé à ses côtés… Son dernier enfant valide, pour le moment kidnappé par des hommes en blouse apparemment plus fascinant que lui-même. Raphael en grommelle de jalousie, avant de regarder une nouvelle fois sa montre en se disant que son téléphone allait bien finir par sonner, parce que les diagnosticiens, cela avait tout de même des vies, en dehors du boulot, non ?

L'Améthyste