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Le lendemain, Mickaël Davis rend visite à son meilleur ami incarcéré au pénitencier de Terminal Island. Le constater vêtu de l’orange de la prison lui brise le cœur et lui retourne l’estomac.
— Tu le sais, toi, que je suis innocent, hein, balbutie Joey avec détresse et abattement.
Il se retient de fondre en larmes. Anéanti, il fixe avec désespoir son binôme brun aux cheveux bouclés, assis devant lui, au parloir.
— Bah oui, bien sûr, lui répond-il dans un raclement de gorge, putain, cette histoire est incroyable. Une putain de maison d’édition…
— J’ai été piégé, tout ceci n’est qu’un complot pour me faire tomber. Mon briquet retrouvé dans les décombres, ça n’a aucun sens…
— C’est sur… Mais pourquoi ? Et qui, surtout ?
— Ma vie a commencé à partir en couilles peu après que tu fasses peur au trisomique, réfléchit Joey. C’est donc forcément Bauer qui est responsable de tout ça. Il a du me relier au mot qu’on lui a laissé et comme il s’intéressait à ma meuf…
Le jeune détenu ne savait pas que son complice blessait aussi Alarich, le jour où il devait l’effrayer jusqu’à ce qu’il pleure, puis lui donner un bout de papier qu’il devait tendre à son frère aîné.
Mickaël en déglutit de culpabilité alors qu’il réalise que les coups sur ce gamin qui ne lui offrait pourtant qu’un doux sourire, malgré de vives menaces et insultes, dégageaient de terribles répercussions sur son meilleur ami…
— Ça ne peut être que ce fils de pute de Joakim Bauer, répète Joey en se tenant la tête d’une main. C’est un psychopathe, parce qu’on lui a rien fait, à son putain de frère !
Son coude repose sur la table du parloir tandis qu’il cherche à toiser son interlocuteur en face de lui : il souhaite le voir acquiescer ses paroles. Il a besoin d’un allié…
— On n’a pas de preuve… soupire Mickaël en regardant ailleurs, l’air gêné. On ne va tout de même pas aller dire aux flics qu’on a traumatisé un triso.
— On doit trouver quelque chose ! Pitié ! Micka ! Il s’agit de ma vie ! Mon futur !
— Peut-être qu’en discutant avec Trisha, on pourrait…
— Par exemple, oui ! Elle doit venir me voir pour qu’on parle ! S’il te plaît, demande-lui de venir me voir ! Que je sache pourquoi elle m’a ainsi piégé avec ce SMS ! Je ne peux pas croire que la Trisha que j’ai connue ait voulu me faire enfermer ! Si ça se trouve, on l’a empêchée de venir prendre ce café avec moi ! Et elle a paniqué quand on lui a parlé du SMS, par honte devant Joakim !
— Si elle est dans le coup avec lui, jamais elle n’acceptera de venir ici…
— Si, car elle ne me déteste pas ! S’il te plaît, demande-lui ! Je dois la voir ! Lui parler !
— Tu es surtout encore amoureux et tu dois lâcher l’affaire… elle ne t’aime plus. Ça se voit à son comportement au lycée, avec Joakim…
— Je dois savoir si elle est dans le coup, ou pas !
— Parce que, bien sûr, si elle l’est, elle va te le dire… souffle Mickaël avec abattement.
Il se sent mal devant son meilleur ami piégé et ne voit pas ce qui pourrait le sauver du funeste avenir qui l’attend. Honteux de son inutilité, il garde pour lui le fait d’avoir souhaité kidnapper Alarich, la veille, pour s’en servir de moyen de pression contre Joakim. « Ce putain de trisomique de merde ne trainait pas en bas de chez lui comme la première fois où il avait pu l’attraper… »