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=== 22h30, Clarkdale.. ===
Cette première journée de colocation pour les deux hommes, ex-amants, s’achève avec brio et si Kristofer est aux anges d’avoir passé toutes ces heures avec son Shane adoré, il en est de même pour le concerné qui a réellement adoré avoir sa présence sous son toit.
Après un repas très copieux, les deux hommes terminent leur soirée avec une partie de billard, tout en sirotant des digestifs très alcoolisés qui ont pour but de les aider à faire passer les délicieuses pâtes à la carbonara de Shane qui ont détruit leurs estomacs respectifs ! Le jeune Helms était certes un excellent cuisiner qui adorait d’ailleurs se mettre aux fourneaux et régaler ses amis, mais il avait aussi une tendance terrible à les faire manger comme quatre. Pour faire simple, Shane resservait ses convives jusqu’à ce que mort s’en suive, mais ses repas étant toujours terriblement succulents, personne ne pouvaient refuser de prendre trois kilos à sa table, quitte à s’en aller crever ensuite sur une cuvette de WC.
Alors que cette soirée s’annonçait magique pour Kristofer, un indésirable vint soudain ruiner tous ses espoirs en sonnant à la porte pour venir chercher son Shane pour une « sortie à deux ». Le concerné reposait d’ailleurs sa quille de billard en moins de deux pour filer aussitôt vers cet imposteur terriblement sexy et dont l’orientation sexuelle ne laissait aucun doute…
Le jeune Varells en tombait des nues et se mettait à balbutier maladroitement en direction de son ex-amant,
– Tu… Tu vas où ?
– Je sors avec Darren. Tu sais où sont les clefs, coloc’ !!! J’ai pris mon double, donc ne te sens pas obligé de rester au loft, si tu veux aller faire la bringue aussi, ne te gênes pas ! On se voit demain !!!!
Sur ce, Shane disparaît de chez lui, sur les talons de cet ami que Kristofer ne reconnait pas, tout en se demandant quel statut pouvait bien avoir ce « connard » qui était resté à le fixer avec son air hautain de petit merdeux. Ce sale type devait surement être l’un des prétendants de son Shane car sur son expression faciale, l’on pouvait lire un « tu as perdu, Varells, ah ah ». Le cœur de Kristofer tambourinait désormais dans sa poitrine et ses yeux s’humidifiaient, tandis qu’il restait seul et con, planté en plein milieu du salon du loft. Dieu que cela faisait mal d’essayer d’imaginer son amour dans les bras ou le lit d’un autre, dieu que ça lui donnait envie de se rouler en boule dans son lit pour pleurer jusqu’à l’aube… La douleur qu’il ressentait n’était en rien comparable à celle qu’il subissait lorsqu’il visualisait la cruche de Trisha, dans les bras de son ami Joakim, puisque cette fois, il s’agissait de Shane, de SON Shane… à lui. Et non d’un simple crush affectif. Au fond, avait-il réellement aimé Joakim Bauer d’un amour véritable ? Il ne sait plus et les larmes qui embuent désormais ses yeux n’allaient pas aider son esprit à y voir plus clair, bien au contraire... car c’est dans ce même liquide qu’il s’endormira ce soir, plus perdu que jamais.
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Le cœur léger, Perrine rentre chez elle après le Parkour qu’elle vient de faire avec son ami et alors qu’elle arrive devant son immeuble, Noah lui envoie un sms amical pour lui proposer qu’ils se revoient le lendemain, en ville. Le cœur de Perrine se serre aussitôt et sans attendre, elle lui renvoit que non, car cette soirée-là était exceptionnelle vu qu’il avait besoin d’un ami et qu’elle ne pouvait pas l’abandonner, mais ils ne reprendraient pas leur relation là où ils l’avaient laissé, toujours pour les mêmes raisons. La jeune fille continuait de se préserver et sauf urgence, elle ne souhaitait plus de sms de la part de son vieil ami.
Noah reçut le message 5/5 et son cœur se rappellerait longtemps de l’impact de cette nouvelle gifle.
Il y avait cru. Pendant un instant, il y avait cru…
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Quelques heures plus tard et en plein milieu de la nuit, Raphaël sursaute et réalise que son téléphone ne lui affiche ni appel en absence ni réception de nouveaux sms. Ce fait angoisse terriblement le père de famille qui s’imagine déjà le pire et sans attendre une minute de plus, il se dépêche d’appeler son fils. Par chance, celui-ci lui répond aussitôt en lui annonçant qu’il passait la nuit sur ses recherches.
Raphaël n’en revenait pas d’apprendre que son ainé était encore dans sa salle de diagnostiques à dévorer le programme de médecine et qu’en plus, il semblait en être terriblement heureux. Sa voix était claire et posée, tranquille et calme. Adieu l’habituelle froideur et la constante mauvaise humeur, Raphaël redécouvrait son fils à cet instant et il avait l’impression de ne jamais l’avoir senti aussi heureux à l’autre bout d’une conversation. L’adolescent avait presque l’air enjoué, aux anges d’apprendre autant, oubliant limite les drames qui frappaient les siens, Joakim renaissait. Comme un petit-enfant qui gribouille une aquarelle en cours de dessin, l’adolescent était en pleine extase. Au septième ciel. Il raccrochait d’ailleurs sa conversation, peu après, en disant amicalement à son père qu’il avait encore à lire et qu’il lui faisait perdre du temps !!!
« Amicalement » …. Raphaël en tombait des nues, tout en esquissant un sourire ému, les yeux déjà humides, de réaliser son fils aussi heureux. C’était dingue. Le ciel pouvait s’effondrer sur la tête de son rejeton, il suffisait de lui filer une bibliothèque de livres de médecines pour le voir ressusciter et avoir des étoiles dans les yeux. C’était tout simplement dingue ! Mais cela fit rire Raphaël, lui réchauffa le cœur et du coup, ce ne sont pas les yeux inondés qu’il se rendormira ce soir, mais avec un large sourire, signe de son apaisement. Demain, il se rendrait à l’hôpital pour apporter des vêtements de rechange à son fiston, au cas où le concerné ne veuille pas rentrer tout de suite.