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Perrine est de mauvaise humeur aujourd’hui et n’a pas rejoint les Drifterz après ses cours. À la place, elle a passé la fin de journée avec son propre crew ; ce qui ne lui a pas déplu, d’ailleurs. Eux aussi appréciaient de la revoir trainer avec eux, parce que depuis quelque temps, Noah semblait la leur avoir volée… Alors qu’il est le seul à ne pas avoir remarqué son béguin pour lui.
Le blondinet était-il aveugle ? Ou ne l’a-t-il jamais considérée comme une fille ?
Son attitude avec elle était déconcertante. Parfois, il semblait flirter, mais ensuite il semblait la considérer comme une amie, une acolyte.
La jeune Française ne sait donc plus à quel saint se vouer et est fatiguée de continuer d’y croire. Pourtant, et malgré ce désir réel de commencer à le snober, jusqu’à complètement l’oublier, il lui manque aujourd’hui terriblement.
Elle lutte actuellement, vautrée devant la télévision, contre l’envie d’allumer son ordinateur portable dans sa chambre pour le retrouver sur Skype. Accro. Oui. Elle prend conscience avec effroi qu’elle est accro à lui. Effroi et honte. Elle n’aurait jamais cru pouvoir s’abaisser à tant de niaiserie. Elle ne vaut finalement pas mieux que toutes les midinettes insipides de son âge et cela lui donne envie de vomir. Elle aurait aimé être différente… Mais au lieu de cela, elle se constate en train de suffoquer dans un tourbillon de sentiments nouveaux.
C’est avec dégoût qu’elle grimace, bougonnant tout ce qu’elle peut, quand sa sœur, âgée de quatre ans de plus qu’elle, pénètre dans l’appartement, apparemment de bonne humeur, pour la sermonner affectueusement dès qu’elle la remarque devant une émission de télé-réalité française.
– Ohhh, éteins-moi ça, on n’a pas le satellite pour que tu te crames le cerveau ! ! !
– C’est la fan de Koh-Lanta qui parle ! Rit Perrine. Viens regarder avec moi ! C’est le début, là, ils présentent les personnages !
– D’accord, je m’installe devant ton Daube Story, mais tu me racontes pourquoi tu as l’air au bord du suicide ?
– Je, je… mais je ne suis pas au bord du sui… se défend honteusement Perrine en rougissant jusqu’aux oreilles.
– Vas-y, dis-moi tout. Ton crew s’est trouvé une autre fille et tu n’es plus la princesse du groupe ?
Perrine éclate de rire.
– Rien à craindre à ce niveau, je n’aurais jamais de rivale !
L’adolescente se remplit de fierté, avant que son visage ne s’assombrisse de nouveau.
– Alors, qu’est-ce qui peut bien te miner ? Tu as un souci au lycée ?
– Non…
Marion regarde sa montre et soupire.
– Je sens qu’on en a pour un moment… alors je vais écourter les questions-réponses et en venir directement à la plus importante : tu t’es disputée avec Noah ? !
Perrine pique un fard et devient cramoisie. Sa sœur visait juste, tant elle l’a harcelé d’informations sur son nouvel ami, Noah Beckers, qu’elle considérait comme le meilleur des Drifterz, le plus gentil, le plus beau et le plus drôle de toute la Californie.
– Je, je… Non ! assure Perrine en secouant vivement la tête de gauche à droite.
Son aînée ne doit pas penser une seule seconde qu’elle puisse se disputer avec Noah.
– C’était donc ça. Le dieu Noah ! Tellement prévisible… Tu me déçois, petite sœur ! pouffe Marion.
– Mais on ne s’est pas disputé, insiste Perrine, nerveuse. Parce que j’aurais préféré…
– Il a quel âge déjà ?
– Dix-neuf.
– Comment ça se fait qu’il soit encore au lycée ? Il est débile ou quoi ? Et c’est parce que le neuneu te plait que tu es triste ?
– Il n’est pas neuneu ! Il a fait exprès de redoubler l’an dernier pour rester dans le même établissement que son meilleur ami et cousin ! défend héroïquement Perrine, les yeux brillants d’admiration. « Noah, c’est quelqu’un qui est très attaché aux gens qu’il aime, il est sensible ! Et je sais qu’il ne m’aime pas… Il sort déjà avec une pisseuse qui n’a pas inventé le fil à couper le beurre… »
– Il te l’a dit en face ? Qu’il ne t’aime pas.
– Non, mais ça se voit qu’il me voit comme une amie…
– Ce qui se voit, c’est que vous êtes vachement proches, tous les deux, et tu sais ce que je pense de l’amitié homme/femme…
– Non, tu te trompes. Je ne suis pas du tout son genre, tu verrais sa copine, une espèce de pouf, ambiance petite star… Et elle est vraiment belle, cette pute.
– C’est méchant pour les putes. Elles, elles n’ont pas chchoisie faire ce métier.
Les deux sœurs rient aux éclats, et Marion reprend plus sérieusement :
– Arrache le pansement une bonne fois pour toute, va lui dire ce que tu ressens, et advienne que pourra. Et s’il est con au point de cracher sur votre complicité pour garder une idiote, tu n’auras plus qu’à l’oublier et aller de l’avant ! Tu le revois quand ?
– J’étais censée le voir à la soirée de Zack, un Drifterz, mais j’ai pas très envie d’y aller.
– Tu pensais que papa et maman allaient te laisser sortir en semaine ? souligne avec amusement Marion, avant de reprendre plus sérieusement. Pas grave, je te couvrirais. Tu vas aller à cette soirée et arracher ce fuckin’ pansement ! Et si tu foires ton coup, tant pis, au moins tu seras fixée sur le fait qu’il ne te mérite pas.
– Je ne sais pas… J’ai pas envie de me ridiculiser.
– Qu’est-ce que tu risques, au pire ? Les Drifterz ne sont même pas ton crew, donc, à la limite, si ça se passe mal, qu’est-ce que ça peut faire ? De toute manière, te connaissant, tu te préparais à t’éloigner de Noah pour ne pas souffrir. Ne nie pas, tu fais toujours ça ! Donc, quitte à ce qu’il sorte de ta vie, autant que ce soit pour de vraies raisons !
– Oui, mais tu sais que j’ai rien à me mettre ! J’ai pas envie d’être la laide à côté des autres filles. Les Drifterz sont toujours entourés de bombes ! !
– T’inquiète, viens, on va dans ma chambre, je vais te trouver un truc à te mettre et tu vas être une bombe ce soir !
– Mais je parie que sa conne sera là aussi. Et je ne te dis pas l’humiliation s’il me met un râteau…
– Mon petit doigt me dit que ça n’arrivera pas ! Allez, viens ! Incite Marion pour conclure en tirant sa sœur par le bras pour la trainer avec elle dans sa chambre.