~ 009 ~

*

Le lendemain, vers 17h, Joakim et son cousin Noah se rendent à la plage juste après leurs cours, afin de piquer quelques têtes et accessoirement, admirer le joli panorama des lieux ; de jolies jeunes filles en bikini qui profitent du soleil.

En effet, ici, à L.A, les Californiens travaillent dur, mais plus tôt que nous ! Ils finissent leurs journées en plein milieu d’après-midi pour se jeter avec avidités sur les longues plages de sable fin ! Notez qu’à Los Angeles il fait 270 jours de soleil par an et la température est toujours comprise entre 18° et 30°. Pistes cyclables, roller, skate, bronzette… On peut dire que les Angelins profitent de la vie !

À peine arrivés, Joakim et Noah reconnaissent très vite deux visages féminins qui leur sont familiers. Amy et Trisha sont couchées sur des chaises longues, devant la plage.

Elles ont apparemment eu la même idée qu’eux. Farniente, discussions sans fin entre amies, ainsi que mise en valeur de leurs précieux atouts et charmes dans le but de faire tomber dans leurs filets quelques beaux Californiens.

— Le monde est petit ! Fais discrètement Noah à son cousin et celui qu’il considère comme son meilleur ami. En effet le fait d’avoir grandi dans des maisons voisines n’a fait que renforcer les liens des jeunes hommes au fil des années.

Ils sont aujourd’hui, l’un pour l’autre, plus frères de cœur que simples cousins.

— On trace, vite, ordonne Joakim en esquissant une grimace de dégoût et en accélérant le pas dans la direction opposée, tandis que son interlocuteur et ami le suit avec empressement,

— Attends, ne sois pas pressé, on peut les inviter à boire un verre !

— Euh… Non.

— Genre ! Je sais qu’entre toi et Amy ce n’est pas trop ça, mais en ce qui concerne Trisha ? Eh eh ! Tout le monde a remarqué qu’elle te mate à fond ! Hey ! Attends ! Reviens !

Noah rit en courant derrière son cousin qui part s’installer sur la plage, à bonne distance des demoiselles.

Blasé, Joakim soupire,

— Elles sont aussi creuses l’une que l’autre, ce sont des boulets insipides.

— Ah ? Mais en fait, Jo’, est-ce qu’il y a une seule personne sur terre que tu ne considères pas comme un boulet ?

— Je commence à me le demander… Et d’ailleurs, en parlant de ça, je crois que je vais devoir te laisser !

— Salopard ! Rit Noah en observant les courbes de la jeune Trisha qui se déplace désormais en direction de la mer, aux côtés de sa meilleure amie

— Elles sont quand même pas mal du tout.

— Des poupées gonflables sans cervelle, oui.

Noah cherche à changer de sujet, il déteste critiquer, rabaisser autrui et ne souhaite pas que son cousin continue de le faire…

Parfait, il vient d’apercevoir leur autre compagnon de classe, Alex Taylor. Celui-ci est en train de se rapprocher de Trisha et Amy. Il va pouvoir parler d’autre chose que des deux jeunes filles !

— Il est toujours fourré avec elles, Alex, commente Noah alors que son interlocuteur ne l’écoute plus, perdu dans ses pensées. Monologuant, le Breakdancer blond continue tout de même, l’air rieur,

— Et puis tu crois qu’il viendrait nous voir ce salaud ?

— Il te manque une paire de trucs ronds sur le torse pour lui plaire.

— Si ça se trouve, il est gay.

— Et si ça se trouve, je m’en fous.

— Et si ça se trouve, tu es gay.

— Et mon poing dans ta gueule, il est gay ?!

Noah répond à la réplique de son cousin en riant. Il reprend ensuite plus sérieusement ; mais toujours avec son air enjoué,

— Allez viens, on va les voir, ça suffit de faire les asociaux.

— Pourquoi ? Laisse-les, Alex va peut-être conclure. Joakim soupire cela en se relevant du sol. Il se met ensuite en chemin vers la mer pour piquer une tête.

— Justement, c’est ça qui m’ennuie ! Informe Noah en suivant son cousin pour continuer de parler. Quoi ? Il n’est pas bavard, disons juste que dès qu’il commence, il ne s’arrête plus. Une vraie fille, à ce niveau.

— Ne me dis pas que tu es intéressé par l’une des cruches ?

— Bah quoi… Je ne suis jamais sorti avec une blonde, alors que ma couleur de cheveux me prédestine pourtant à le faire !! Amy est peut-être mon dest….Hey ? Joakim ?!

Joakim ne l’écoute déjà plus, préférant essayer de battre son propre record d’apnée pour tenter d’échapper à son moulin à paroles de cousin.

~ 010 ~

 

*

 

 Quelques heures plus tard , vers vingt et une heure, c’est un long et copieux repas familial qui se termine au domicile Bauer ; les Mullers et les Beckers ont été de la soirée et le diner en est désormais à sa phase terminale. Les discussions animées vont bon train et le passé de chacun se narre avec plaisir et nostalgie.

Les plus jeunes du groupe ne sont déjà plus de la partie, pas vraiment friands de ces longues réunions familiales qui s’éternisent et qui sont très fréquentes, ils ont tous fuis la pièce dès leur dernière bouchée avalée.

Le brun Erwan Muller sermonne, sur un ton mi-amical, mi-sévère, en direction de son beau-fils,

— Jeff ! Tiens toi droit, on dirait un gitan, tu ne donnes pas le bon exemple aux enfants, imagine que l’un d’entre eux te vois ainsi avachi à table !

— Ah mais aucun risque pour ça, ils sont montés et ne redescendront plus, intervient aussitôt Éva pour appuyer son frère jumeau.

La jolie blonde, Ana, épouse Beckers, laisse échapper un petit rire étouffé.

— Et encore on a de la chance je trouve, car ils ont mangés avec nous ! Nous, vous pouviez vous brosser pour que l’on se coltine vos diner familiaux soporifiques.

Jeffrey fais référence à sa propre adolescence, alors qu’il vivait avec sa soeur jumelle, sa mère ainsi que son beau-père. La belle époque !

— Je confirme, soupire Vanessa Beckers, épouse Muller, en se retournant d’un coup vers son homme pour reprendre d’un air amusé, — tu te souviens chéri, quand ils préféraient se commander des pizzas pour manger dans leur chambre, devant la console ?! On était vraiment trop gentils, quand j’y pense.

— Oh que oui que je m’en souviens, rit franchement Erwan Muller avec émotion.

 

 

*

 

 

Pendant ces beaux discours qui relatent un passé heureux, et ce, depuis déjà vingt bonnes minutes, Joakim, accompagné de sa liseuse et de son frère cadet, a filé sur la plage, devant la maison, afin de lire paisiblement Finnegans Wake, un roman de James Joyce.

C’est l’une des routines préférées des frères Bauer ; s’octroyer cette petite pause pour méditer, se relaxer, avec pour unique ambiance sonore le son des vagues qui viennent s’écraser sur le sable.

Joakim a un lien particulier avec son cadet qui est, et malgré ses déficiences mentales, une compagnie idéale, un être d’exception qui apaise les esprits les plus tourmentés rien que par sa simple présence. Et puis il faut dire aussi que de personnalité solitaire, Joakim apprécie les gens calmes et reposants, lors de ses moments relaxations.

Et qu’il y a t’il de plus confortable au monde qu’une retraite sous les étoiles dès la nuit tombée. L.A étant une si belle ville qu’il serait insensé de se priver de pareil moment à admirer les lumières de la cité des anges qui se reflètent avec souplesse sur l’océan Pacifique.

Le troisième membre de la fratrie Bauer arrive soudain derrière l’aîné de celle-ci, pour le surprendre et s’asseoir très vite à ses côtés, sur l’un des rochers contre lesquels le concerné est adossé.

Joakim soupire alors aussitôt en conséquence,

— Oui ?

— Qu’est-ce, tu lis ?

— La recette du foutou banane. Maugrée Joakim, blasé par cette question idiote. Il maudit les gens qui parlent pour ne rien dire ! Si ce n’était pas sa petite soeur qui venait de commettre l’impardonnable à ses yeux, il lui aurait bien envoyé deux ou trois insultes cinglantes pour lui apprendre à tourner une dizaine de fois sa langue dans sa bouche avant de l’ouvrir.

— C’était histoire de parler.

Joakim ne répond rien à cela et se replonge simplement dans sa lecture. Il n’a rien à ajouter et préfère se concentrer. Il est à un chapitre passionnant !

— Tu penses que j’ai un problème ? Reprends Erika dans un soupir en contemplant le ciel étoilé, l’air pensif.

— Non, mais tu vas en avoir un bientôt si tu ne me laisses pas tranquille.

— David m’a larguée, il dit que je ne me consacre pas assez à notre couple. Confesse Erika sans se soucier des mises en garde de son frangin. Elle a l’habitude. Joakim Bauer n’est pas de ceux sur qui l’ont peut étancher sa peine pendant des heures. Ou alors cela dépend des cas. Et du degré d’affection qu’il porte à la personne. Et encore… Sachant que Joakim déteste les pleurnicheries et que cela l’horripile au plus haut point…

— Cela t’étonne ? Fait-il avec nonchalance à sa cadette, face à son apparent problème. Il ne semble pas vraiment surpris.

— Je ne sais pas…

— Tu n’as pas deux compétitions importantes qui commencent bientôt ?

— Si, mais…

— Alors, va t’entraîner au lieu de me casser les pieds. Car je suppose que tu as encore envie d’écraser Gray.

— Bah carrément! se surprend à lancer presque joyeusement Erika, avant de souffler avec un soupçon de lassitude,

— T’es quand même chiant, on peut jamais te parler, c’est lourd…

— T’as mieux à faire que de larmoyer maintenant que tu es débarrassée de ton looser. A plus et bon entrainement !

— Je sais, lui réponds sa soeur en lui donnant une petite tape affectueuse derrière la tête, avant d’ajouter, l’air songeur,

 — C’est pas faux ce qu’il m’a dit, tout de même, j’ai pas de temps à consacrer à une relation. Il a vraiment raison en un sens et même si ça me désole, ça ne me rend pas triste, au fond. Je pense que je m’en fiche. Tu penses que c’est normal, toi ? Oh bien sûr, il me manque un peu, j’avoue ! Son humour pourri me manque, il était marrant quand même ! Mais j’ai l’impression de l’avoir plus considéré comme un ami qu’autre chose ! Un bon ami… Il ne me manque que pour les longues discussions qu’on pouvait avoir ensemble ! Ça j’avoue, ça me manque, ouais, et je me demande si on pourra redevenir amis avec le temps, qu’est-ce que t’en penses ?

Pas de réponse.

— Bon je monte, des fois, t’es vraiment chiant. Y a qu’avec Kristofer que t’es cool!! Et après on se demande pourquoi je pars chercher des loosers en amis mecs, avec un frère pareil ! Tu ne remplis juste pas du tout ton role ! informe Erika de façon joviale malgré tout et en se relevant de sa pierre. Elle ne relève plus son habituelle indifférence. Qui des proches de Joakim Bauer ne connait pas ce caractère désintéressé, après tout. Joakim n’est et ne sera jamais une épaule sur laquelle pleurer, mais il sait être, cela dit, un guide précieux. Pourtant, et cela la jeune fille le regrette amèrement en tournant les talons, à une vieille époque désormais révolue, il y a de cela de longues années, son grand frère n’était pas encore cet être renfermé et souvent froid.

— Erika!!!Appelle Alarich en courant après sa jumelle pour l’agripper affectueusement par le bras et la suivre. Il abandonne ainsi Joakim sur la plage pour faire de lui l’homme le plus heureux du monde ; enfin un peu de solitude…

~ 011 ~

*

 

— Maman prévient de l’extinction des feux, elle te dit de monter, informe Riley Adams en direction de sa demie soeur par alliance, Molly Gray, pour que la concernée quitte enfin sa salle de danse pour rejoindre ses quartiers. En effet, en pleine semaine et passé 23h, dans le foyer de Luke Gray et Marcie Adams ; une famille recomposée parmi tant d’autres ; tout le monde doit être douché et prêt à se mettre au lit ! Telles sont les règles de la maison et même Molly Gray, la grande fierté de la famille au vu de ses incroyables prouesses en danse, n’a pas le droit de déroger aux règles établies.

— Dis-lui que je monte dans cinq minutes, renvoie Molly à sa sœur sans arrêter ses pas de danse.

— Cinq minutes, ou cinq heures, ironise Riley en haussant les épaules, se moquant ainsi du fait que la ponctualité et son interlocutrice soient deux choses bien distinctes qui ne font pas qu’une, loin de là.

— Si tu le dis, maintenant bouge ! Grogne Molly Gray, désormais irritée.

— Elle te tient à cœur la compétition StarQuest à toi aussi, hein !

— J’ai une revanche à prendre !

En effet, il y a quelques semaines, Erika Bauer s’est hissé de justesse à la première place de la compétition Hall Of fame, alors que cet honneur se jouait entre elle et la blondinette, les deux éternelles rivales des WatchaSay de Los Angeles.

— Erika est meilleure, basta, accepte le et voilà ! Rabaisse volontairement Riley qui ne s’est jamais vraiment entendue avec sa demie soeur et qui aime par contre plus que tout la rivale de celle-ci.

— Elle n’est pas meilleure ! Elle a juste eu énormément de chance. Elle n’a gagné que grâce à son choix de chanson qui a plus plu au jury que le mien. Tout le monde le sait et tout le monde le dit, j’ai été largement meilleure qu’elle  qui a enchaîné les fautes! Et puis de toute manière cette compétition ne m’intéressait pas, moi c’est à StarQuest que je veux la première place ! Et je l’aurais !

— N’importe quoi, pouffe Riley en tournant les talons pour monter dans sa chambre.

La jeune Adams rit intérieurement d’avoir touché si vite le point sensible de sa demie soeur. Les deux jeunes filles pouvant parfois être de vraies pestes l’une envers l’autre. La faute à Luke Gray qui a si vite séduit Marcie Adams pour la faire divorcer de son époux cinq mois plus tard, tout en trompant allègrement sa conjointe Anna Gray pendant sa phase de séduction. Sa fille Molly ne lui pardonnera jamais cette cruelle infidélité qui lui a fait perdre tout respect envers la gent masculine et sa belle-fille Riley le méprise plus que tout aujourd’hui pour être la cause de la destruction du foyer dans lequel elle a grandi.